Archives de catégorie : News

Parce que le hip hop actuel vaut aussi le détour…

Del & Tame One – Flashback [2009]

Del & Tame One – Flashback [2009]…au premier abord la combinaison entre Del, issu de la créative scène d’Oakland, Californie, et Tame One, ardent défenseur d’un hip hop rigoureux et adepte assidu de graffiti dans les ruelles crasseuses de son New Jersey natal, pouvait sembler improbable…en y regardant de plus près, ils partagent pourtant des parcours similaires (« Parallel Uni-verses » affirme le titre du disque) puisque leurs débuts (respectivement avec le collectif Hieroglyphics et le groupe Artifacts) sont marqués par leurs illustres cousins, Ice Cube pour l’un et Redman pour l’autre…cette parenté leur a certes ouvert quelques portes au début des 90’s mais devint rapidement encombrante, car trop souvent soulignée par les médias, pour des artistes qui chercheront ensuite à s’en détacher quitte à s’enfermer parfois dans des expérimentations peu convaincantes…cette relative intransigeance, et malgré des sorties plutôt inégales, leur garantit toutefois une cote importante auprès de cette frange de la communauté hip hop attentive aux démarches sincères…après des années à se croiser dans les différents événements hip hop à travers le monde (à l’image de cette vidéo tournée dans un festival à Brooklyn), les deux MC’s décident de travailler sur un album commun et en confient la conception sonore au beatmaker Parallel Thought…celui-ci leur concocte des instrus à la mesure des ces deux amateurs de rimes à la fois surréalistes et lucides en empilant violons soul (« Keep It Up », « We Taking Over »), guitares hypnotiques (« The Franchise », « Specifics »), sonorités proches du trip hop anglais (« Gaining Ground ») ou arrangements à base de samples funk jazz plus traditionnels (« Teddy », « Special ») et de basses rondes (« Before This » ou ce « Flashback » à la rythmique old school)…dans un album concis à l’ambiance désenchantée (face à un hip hop perverti par la recherche constante du succès) rappelant les productions Def Jux, symbolisée par l’excellent « Life Sucks » et son clavier lancinant, les beats proposent une certaine emphase agencée avec suffisamment de finesse pour ne pas paraître pompeuse…ce travail de production particulièrement réussi permet à l’alchimie entre les deux MC’s d’opérer de façon magistrale et fait de ce « Parallel Uni-Verses » un album qui pourrait aisément être rangé dans la catégorie des classiques de la musique rap…

http://parallelthought1.bandcamp.com/album/parallel-uni-verses

Lil’ Fame & Termanology – Hustler’s Ringtone [2012]


Lil’ Fame & Termanology – Hustler’s Ringtone (ft. Bun B) [2012]…Lil’ Fame, éminent représentant de Brooklyn, NYC, s’échappe, le temps d’un album, de son groupe MOP et élargit son horizon musical…il se retrouve ainsi à partager le micro avec Termanology, MC au flow plus posé que son habituel compère Billy Danze (que l’on retrouve quand même sur un morceau) et ici avec le gangster texan Bun B (du groupe UGK)…en grande partie produit par ses soins (sous le pseudonyme de Fizzy Womack), l’album « Fizzyology » prend une teinte plus fine et moins braillarde que ses précédents opus en duo, probablement influencé par la présence aux manettes de Statik Selektah, Alchemist ou le partenaire de longue date, DJ Premier…autant de beau monde prouve que l’on a affaire à un old timer toujours à la pointe comme le démontre ce beat heurté aux intonations soul, marque de fabrique d’un certain classicisme hip hop remis au goût du jour…

Lord Lhus – Gravediggin [2015]


Lord Lhus – Gravediggin [2015]…ayant quitté à la fois son groupe Bloodline et sa Caroline du Sud natale, ce MC voyage à travers l’Europe au gré de ses collaborations avec les beatmakers les plus en vue du vieux continent…ainsi après avoir travaillé avec les allemands de Snowgoons et le français Al’ Tarba, Lord Lhus semble avoir choisi les Pays-Bas et les pays de l’Est (et à nouveau la France avec le collectif Le Gouffre) comme terrains d’expression pour son style brutal…le savoir-faire de ces scènes locales en matière d’horrorcore n’est plus à démontrer mais dans cet album (« Lord Hates Pretty ») les arrangements violon/piano souvent bien trop convenus et froids laissent place à des instrumentations plus discrètes…le MC au flow colérique s’y laisse alors aller à des réflexions politiques et des délires sanguinolents (à l’image de cette vidéo pleine d’hémoglobine à déconseiller aux âmes sensibles) tout à fait explicites, pour un résultat d’excellente facture…

Illa J – Universe [2015]


Illa J – Universe [2015]…après un premier album très réussi (« Yancey Boys » en 2008) où les prods étaient assurées, à titre posthume, par J-Dilla son regretté frangin, Illa J propose un deuxième album éponyme tout aussi inspiré… le duo venu de Montréal, les Potatohead People (Nick Wisdom & AstroLogical), produit entièrement ce disque relax où l’influence du plus connu de la famille Yancey reste encore très présente…ainsi les accords de piano rythmiques de « Cannonball » ou la basse pneumatique de « All Good pt 2 », « Never Left » et « Perfect Game » n’auraient sûrement pas été boudés par Dilla, notamment dans ses premières prods pour Slum Village…mais une autre influence semble se faire jour dans le travail d’Illa J, celle du toujours excellent Moka Only (Canadien extrêmement prolifique et compagnon de route des Swollen Members)…celui-ci, en featuring sur 4 des 11 titres de l’album, apporte son goût pour les beats aiguisés mais tout en finesse (« Who Got It »), les ambiances évanescentes (« She Burnt My Art ») et les sonorités étranges (« All I Need »)…pourtant, contrairement à son premier opus, Illa J élargit ici son horizon musical en s’éloignant quelque peu du rap le plus pur…en effet, il pose parfois son flow sans heurts sur des beats au feeling très électro 80’s (« Strippers », « French Kiss ») avec des arrangements vintage parfaitement agencés pour ensuite aller lorgner vers le funk le plus dansant (cet entraînant « Universe » aux sonorités très jacksoniennes) voire même du côté de la house music chère à sa patrie de Detroit qu’il amène vers une vibe lounge qui lui sied parfaitement (« Sunflower »)…en résumé Illa J livre un album tout à fait recommandable dans lequel il alterne avec une aisance déconcertante et sans démonstration excessive, scansion rap et ligne de chant soyeuses pour mieux entraîner l’auditeur dans un chaleureux tourbillon d’émotions et de sons hautement addictifs et délicats…une des grosses claques de cette fin d’année!

https://illa-j.bandcamp.com/album/illa-j

L’Or du Commun – Le Chill [2015]


L’Or du Commun – Le Chill [2015]…après un EP (« l’Origine ») encore un peu « juvénile » et bourré de samples déjà bien connus dans l’underground hip hop, ce quatuor bruxellois (Premier d’Classe, Loxley, Swing & Féléflingue) propose un premier album (« l’Odyssée ») où la vibe vintage des 90’s est bien mieux maîtrisée (ici sur un sample relax et funky de Bob James)…dans un boom bap à la fois jazzy et dynamique, les 4 MC’s remettent au goût du jour ces flows sautillants et polymorphes influencés par les premières sorties de La Cliqua ou de Sleo par exemple…avec des textes oscillant entre ego-trip, considérations sociales légères, récits du quotidien et rimes loufoques, le groupe montre que la Belgique n’est pas en reste lorsqu’il s’agit de reprendre les codes de l’âge d’or du rap francophone des 90’s…(merci @k7pacoje pour la découverte)

Black Knights – Hood Liberator [2015]


Black Knights – Hood Liberator [2015]…quel est le point commun entre les Red Hot Chili Peppers,  émérites représentants d’un rock-funk aux arrangements ciselés, et le Wu-Tang Clan, meute de furieux ayant dynamité la communauté hip hop au début des 90’s ? Aucun à première vue, si ce n’est l’adoption progressive d’un son plus « pop » au cours des années.. C’était compter sans l’éclectisme de John Frusciante (ancien guitariste des RHCP et principal compositeur des meilleurs albums du groupe) et son goût de l’expérimentation. Vvéritable rat de studio au cerveau mis en ébullition par des années de consommation de psychotropes en tous genres, il se lance dans la production hip hop en remettant en selle ce groupe californien affilié au Wu-Tang (entendu pour la première fois sur la compilation « Wu-Tang Killa Bees » en 98). Le résultat de cette collaboration improbable est assez surprenant, après un premier album où le guitariste cherche encore sa patte de beatmaker, englué dans une production très lisse, le trio renouvelle l’expérience en 2015 avec ce deuxième opus (« The Almighty »). Frusciante se révèle, en tant qu’infatigable dénicheur de sons, être à la pop psychédélique ce que Madlib est au jazz (toute proportion gardée pour un beatmaker aussi peu expérimenté) et réussit à combiner habilement une certaine naïveté pop désabusée à cette noirceur urbaine purement hip hop (incarnée par les flows incisifs des deux MC’s, Rugged Monk & Crisis) en empilant des détails sonores très lo-fi dans une production fournie mais jamais démonstrative, construite autour de changements de rythmes déroutants et d’une certaine emphase. La présence du RZA en personne sur le disque semble d’ailleurs valider la démarche. Entre producteurs aux idées aussi larges que farfelues, le dialogue ne pouvait qu’être constructif…

BlabberMouf – Writerz Block [2015]


BlabberMouf – Writerz Block [2015]…au sein du collectif Da Shogunz, ce néerlandais à l’énergie scénique reconnue pratique un rap nostalgique du boom bap new-yorkais du début des 90’s…une nouvelle fois entouré des beatmakers Propo88 et Kickback (qui produit ce titre) il propose un album aux saveurs old school bien éloignées des canons du hip hop moderne mais qui raviront les « puristes » les plus exigeants (et qui leur rappellera le old timer ADOR, anciennement produit par Pete Rock)…cependant le MC a retenu de cette période dorée les rythmiques uptempo et la science du kickage de beat en règle avec ce flow mitraillette caractéristique (et parfois un peu irritant) plutôt que la revendication sociale, la noirceur des histoires de rue ou l’introspection larmoyante…un hip hop qui ne boude pas son plaisir en somme…

Vince Staples – Señorita [2015]


Vince Staples – Señorita [2015]…après plusieurs mixtapes remarquées et de nombreuses collaborations avec Mac Miller ou les membres du crew Odd Future, le californien Vince Staples propose un premier album où les influences de ces « mentors » se font clairement sentir. Ainsi, il allie le côté débridé du premier à cette économie de moyens chère aux deuxièmes. Mais sa maitrise d’un flow à la fois lymphatique et sautillant sur des rythmes rigoureux, produits en grande partie par le vétéran No ID, rend l’ensemble très abordable, bien qu’exigeant, entre modernité musicale et repères rapologiques solides…

http://www.vincestaples.com/

RC Gäng – Skalp [2014]


RC Gäng – Skalp [2014]…ce duo de MC’s originaires d’Autriche propose un premier album (en free DL) construit sur des sons de batteries assez secs parfois habillées d’atours jazzy plutôt classiques (comme dans ce titre typique du boom bap des 90’s) mais qui se parent d’arrangements plus électroniques et de passages chantonnés avec légereté…les réfractaires aux sons « passéistes » pourront ainsi se satisfaire d’un album cohérent aux références contemporaines mais qui n’oublie pas les basiques rapologiques…

Big Shug – Off Rip [2015]


Big Shug – Off Rip (ft. Termanology & Singapore Kane) [2015]…nouvelle sortie pour le old timer new yorkais ancien membre de la Ganstarr Foundation…et comme à son habitude il livre un album (« Triple OGzus ») assez inégal, fait de titres rendant justice à sa voix puissante (concoctés pour la plupart par DJ Premier) mais rempli aussi de morceaux plus soul où Shug s’essaye (sans vraiment convaincre) au chant…pourtant la qualité des instrus, de ce « Off Rip » menaçant par exemple, laisse encore transpirer la noirceur du rap des 90’s et permet à l’auditeur intransigeant de trouver son bonheur…ainsi, accompagné de l’hystérique Termanology (un autre protégé de Preemo) et de Singapore Kane, son habituel acolyte au flow relax, Shug envoie l’un des meilleurs titres de ce début 2015 fracasser les tympans des B-boys…

http://www.djpremierblog.com/2015/big-shug-triple-ogzus/