Junior Rap Videos


Junior Rap Videos…grâce au succès commercial du genre à la fin des 80’s, la production rap explose outre-Atlantique dans la première moitié de la décennie. Afin d’avoir une exposition plus importante au milieu de cette jungle rapologique, ou le meilleur côtoie parfois le médiocre, les labels et maisons de disques tentent par tous les moyens de se distinguer en proposant des sorties qui toucheront un public le plus vaste possible. Ainsi, et en partie pour rendre le rap moins sulfureux et accessible à toute une jeunesse contrainte par la censure (le fameux sticker « Parental Advisory » interdisant la vente aux mineurs des disques qui le portaient), une vague d’adolescents rappeurs déferle sur le monde du hip hop, avec plus ou moins de talent et de réussite.
Pour mieux appréhender ce phénomène, il nous faut distinguer plusieurs caractéristiques de ces groupes et ne pas confondre véritable démarche artistique et simple coup marketing orchestré par des producteurs aux dents longues…
Dans la playlist proposée ici, il ne faut donc pas confondre des groupes comme Da Youngsta’s, bien implantés dans la culture hip hop (Lawrence « LG » Goodman, producteur reconnu de la scène de Philadelphie est le père de deux membres du trio), auteurs de leurs propres lyrics et de certains beats (aidés en cela par la crème des producteurs, The Beatnuts, Marley Marl ou Pete Rock en tête, sur leur excellent deuxième album « The Aftermath ») et le duo Kris Kross qui mise plutôt sur des productions « pop » et un marketing très étudié (les fringues XXL portées à l’envers dans leurs clips feront des ravages dans les cours d’école de l’époque) et qui remportera un succès planétaire grâce au talent aussi bien musical que commercial de Jermaine Dupri.
De même, impossible de mettre dans le même sac, un groupe comme Quo, duo multi-racial au look très étudié qui, malgré la présence d’Erick Sermon, Redman, DJ Battlecat ou Teddy Riley à la prod, n’ont proposé qu’un seul album où la volonté de truster les premières places des charts avec des morceaux passe-partout était évidente, et Illegal, duo de jeunes MC’s dont les flows tranchants mettaient à l’amende pas mal de leurs aînés (cf. le featuring de Lil’ Malik avec Warren G sur le premier album de celui-ci où le californien se fait sans conteste voler la vedette) sur des productions hardcores distillées notamment par le DITC.
D’autres peuvent également être classés dans cette catégorie des MC’s en herbe à l’assurance microphonique déconcertante. Certains crews phares de la scène hip hop des 90’s ne s’y sont d’ailleurs pas trompé puisqu’ils ont intégré certains de ces rookies à leur écurie. Ainsi Shyheim, Chi Ali ou encore The Whooliganz (duo dans lequel le génial beatmaker Alchemist s’essaye alors pour la première fois à la scansion rappée) seront parrainés par des beatmakers de talent et seront associés à leur posse, respectivement le Wu-Tang Clan, les Native Tongues et les Soul Assassins, conjuguant alors coup marketing  et réussite musicale.
Répondant au célèbre adage « la valeur n’attend pas le nombre des années », l’émergence de tous ces groupes montre la vitalité de cette scène rap des 90’s qui n’hésite pas à lancer dans le grand bain (avec une volonté commerciale plus ou moins assumée) des MC’s au potentiel énorme malgré leur inexpérience. Pourtant, on constate que ces « parachutages » n’ont pas eu de réelle pérennité puisque la plupart de ces artistes n’ont que rarement réussi une carrière florissante, broyés par une industrie de l’entertainment qui les considérait souvent comme des produits. Seuls les Da Youngsta’s proposeront plusieurs albums de qualité alors que le gâchis des carrières de Illegal ou Chi Ali (qui disparaîtront de la circulation assez rapidement malgré une maîtrise rapologique assez folle pour leur jeune âge) et la descente aux enfers d’un Shyheim qui perdit la fraîcheur de son premier album aussi vite qu’il vieillissait, désolent encore les b-boys les plus assidus…et pendant ce temps-là, en France, le public avait la joie de subir les jérémiades d’un Jordy…le décalage qualitatif entre musique pop US et « variété » européenne ne semble pas avoir tellement bougé depuis…

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